La Douille #15 – Donner c’est donner, reprendre c’est voler
Logiciels et conflits d'ex-associés.
Bienvenue dans le quinzième épisode de La Douille, la newsletter qui raconte le droit au monde de la tech. Un dimanche sur deux.
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Un logiciel, c’est la source de tellement de conflits entre associés.
Benjamin et Arthur ont inauguré leur startup en 2021. Une plateforme de mise en relation entre particuliers propriétaires d’objets en tous genres et potentiels locataires.
Le meilleur ami d’Arthur est développeur freelance. Arthur et Benjamin signent son bon de commande de 10.000€ HT pour qu’il développe leur appli.
Benjamin prend le lead sur les échanges avec le développeur car il a un background de designer. Il prend 10h par semaine pour concevoir les interfaces.
L’appli sort 3 mois plus tard.
Elle est canon. Benjamin est fier.
En 2023, Benjamin et Arthur arrivent à la fin de leur droit au chômage. Leur start-up n’a jamais rapporté 1€. Les perspectives ne sont pas folles :
Pas assez d’objets en location, 70% des locataires essayent l’appli une fois et ne reviennent jamais
Au moins une contestation d’un locataire par mois et pas assez de ressources internes pour les gérer
Le volume des locations conclus est inférieur à ce qu’ils avaient espéré, le seuil de rentabilité ne sera pas atteint avant au moins 5 ans.
Après une grande réflexion, Benjamin et Arthur décident de fermer leur SAS et de reprendre un CDI.
Ils s’entendent très bien. Ils tapent « dissolution amiable » sur Google et passent par le premier site qui propose ça pour 200€.
Fin de l’aventure entrepreneuriale.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Sinon, on en parlerait pas dans La Douille.
12 mois plus tard, Arthur commence à sérieusement tourner en rond dans son job.
Il murit un nouveau concept : une plateforme de mise en relation entre organisateurs de soirées et des teufers qui veulent rencontrer des nouvelles personnes.
Il se dit qu’il suffit de dupliquer le code source de l’application de sa première startup en changeant juste le texte et la charte graphique. Il pourrait lancer ce side project en 3 semaines max en parallèle de son CDI.
Il se persuade de ne pas en parler à Benjamin : il n'a pas du tout envie de recommencer un projet avec lui et de toute façon il n’a pas les accès administrateurs au code donc il n’en saura rien.
Il retourne voir son poto le développeur pour lui soumettre l’idée.
Pour s’assurer que Benjamin ne viendra rien lui réclamer, Arthur demande par la même occasion au développeur de signer un doc pour lui céder les droits sur le code. Vu que le développeur n’avait jamais rien signé au bénéfice de la boite dissoute, ils se disent que « ça passe » et qu’on peut bien se rendre service entre amis.
Le nouveau projet ne prend pas super bien.
MAIS avec ces deux expériences, Arthur développe une grosse activité de conseil aux plateformes de mise en relation. Et surtout il revend en marque blanche le template du code de la plateforme avec de la personnalisation clé en main.
Ca cartonne.
Un matin dans le métro, Benjamin stalke la page de présentation du nouveau business d’Arthur.
Il s’arrête sur la section « références clients » et télécharge une appli de mise en relation entre barbiers et barbus.
Sur la page d’accueil, il reconnait direct le design de son appli (enfin de l’appli de la boite qu’ils ont décidé de dissoudre avec Arthur). Plus il avance dans le parcours client, plus il hallucine de voir que c’est un pur copier-coller.
On vous passe l’étape de la trahison et de la rupture amicale.
Par contre, un sou est un sou, Benjamin demande à un avocat d’envoyer une lettre de mise en demeure à Arthur. Il veut qu’il paye 25K€. Son calcul :
5K€ pour le rembourser de ce qu’il a payé sur l’appli en 2021 ; et
20K€ pour rémunérer le temps qu’il a passé à faire toute la conception graphique
Benjamin se souvient aussi qu’en 2021, c’est Arthur qui a déposé leur marque à son nom (pour « raisons fiscales »). Le courrier explique aussi à Arthur qu’il le regrettera si jamais il utilise la marque pour son nouveau projet.
Arthur reçoit la lettre et franchement, ça ne lui fait ni chaud ni froid. Il a le document de cession signé par le développeur, il est safe.
Et d’ailleurs, il avait oublié que la marque est à son nom. Ca le fait sourire, et lui donne même envie de réactiver leur newsletter au nom de la boite avec 5000 abonnés. Il doit bien pouvoir retrouver les codes d’accès.
Il pose la mise en demeure sur son bureau en se disant qu’il y répondra plus tard. Au final, il zappe totalement (warning : ça on ne conseille jamais de le faire, ça peut finir en galère ++, il faut toujours répondre à une mise en demeure).
Benjamin a la haine quand son avocat lui dit un mois plus tard qu’il n’a reçu aucune réponse. Mais au fond, il sait très bien qu’il ni l’argent ni le temps pour un contentieux.
Il n’ira pas plus loin (à part par pour stalker chaque année s’il peut trouver le montant du CA de la boite d’Arthur sur pappers).
Aujourd’hui, Arthur a 12 collaborateurs et s’attaque au marché US.
Alors pour tous les Benjamin passés ou à venir, voici comment éviter ça :
Quand on dissout à l’amiable une société et qu’il y a une appli, des personnages en 3D, une marque ou ce que vous voulez qui a été créé de vos petites mains et de votre cerveau, il faut absolument prévoir ce que ça devient.
Il y a plein d’options, mais les plus fréquentes sont celles-ci :
Option 1 : décider que les créations appartiennent désormais en commun aux associés (et plus à la boite), à hauteur des clauses de liquidation s’il y en a. Dans ce cas, pourquoi pas essayer de les revendre avant la dissolution pour générer du cash.
Option 2 : signer un contrat entre les associés pour dire qu’aucun d’entre eux ne peut utiliser une création sans l'accord des autres.
Les droits de propriété intellectuelle lors d’une dissolution de boîte on sait que c’est une vraie galère et une ENORME source de conflit.
Nous savons qu’il y a des Benjamins qui nous lisent, écrivez-nous. On adorerait connaître votre histoire.
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